Débats relatifs au projet de Décret présenté par Billaud-Varenne, Séance du 9 frimaire an II (29 novembre 1793)


Mots clés : Gouvernement

Débats relatifs au projet de Décret présenté par Billaud-Varenne, Séance du 9

frimaire an II, Archives parlementaires, 9 frimaire an II, p.860-861.

Billaud-Varenne : Je viens soumettre à la Convention nationale le mode de gouvernement provisoire révo1utionnaire qu'elle avait•renvoyé à son comité de Salut public, pour y insérer les amendements qui ont été faits dans une précédente séance[1]. Le comité a apporté dans ce travail toute l'importance qu'il méritait ; je viens aujourd'hui vous proposer en son nom de nouveaux articles qui donnent à ce gouvernement provisoire plus de précision et d'unité. Ces articles sont devenus très essentiels par les faits qui en ont fait naître l'idée.

Il faut d'abord vous prévenir que le zèle des représentants du peuple, envoyés dans les départements, les a portés à créer des institutions qui, par leur défaut do combinaison pourraient devenir funestes à la liberté. L'une de ces institutions est celle des commissions centrales, dont l'esprit est naturellement fédéraliste.

Une autre a encore de plus grands inconvénients : c’est la formation des armées révolutionnaires ; sans doute les représentants du peuple, fatigués par les circonstances et les besoins du moment, n'ont vu que l'intérêt du peuple dans l'adoption de ces mesures; ils n'ont pas senti que la vraie force d'un représentant du peuple est dans son caractère, et surtout dans l'opinion publique dont il doit s'investir. Celui qui n'est pas pénétré de cette vérité est indigne de la représentation nationale.

Il est encore une chose à laquelle on a remédié. L'action des lois est souvent paralysée par des agents secondaires, qui ne sont point responsables. Lo comité a cru devoir les envelopper dans la responsabilité.

Par ce moyen, l'exécution des lois est assurée et n'éprouvera plus aucune entrave.

Enfin, après l'adoption du gouvernement provisoire, que le comité vous propose, et dont les observations que je viens de vous faire ont dû vous faire sentir la nécessité, le comité vous présentera le code révolutionnaire enfoui dans une foule de décrets qui se contrarient. Ce code révolutionnaire sera l'arme du peuple contre les malveillants; c'est avec lui qu'il consolidera sa liberté ; car, après l'avoir conquise ; il ne lui reste plus qu'à envoyer à l'échafaud les conspirateurs qui tenteraient de l'abattre.

Voici le projet de décret que votre comité m'a chargé de vous présenter. (Applaudissements.)

 

Billaud-Varenne en fait lecture.

Plusieurs articles sont décrétés.

D’autre part, le Moniteur du 12 frimaire reproduit avec quelques développements la discussion à laquelle donna lieu, dans la séance du 9 frimaire, le projet de décret présenté par Billaud-Varenne•sur le mode de gouvernement provisoire révo1utionaire de la République. Voici cette discussion que nous empruntons textuellement au Moniteur[2]].

N.B. La Convention ne s'étant pas encore occupée de la suite des articles sur le mode du gouvernement révolutionnaire, nous attendons pour donner ce décret qu’il soit terminé, et que la rédaction en ait été définitivement adoptée. Cependant nous ne croyons pas devoir différer plus longtemps de rendre compte de la discussion qui a eu lieu dans la séance du 9 sur plusieurs articles de ce projet. En voici.les principaux détails :

Merlin[3] : Je demande que le comité de Salut public s’appelle comité de gouvernement.

Billaud-Varenne : Je m'oppose à cette déclaration. Le centre du gouvernement est dans la Convention et je déclare que le jour où la. Convention reporterait cette autorité en d'autres mains quelconques, elle décrèterait l'éversion de la liberté.

Barère. La Convention gouverne seule, et doit seule gouverner ; le comité de Salut public n’est pas le seul instrument dont elle se serve ; elle se sert aussi pour leurs fonctions respectives du comité de sûreté générale et du conseil exécutif. Nous sommes le bras qu’elle fait agir, mais nous ne sommes pas le gouvernement. Nous dénommer comité de gouvernement, c’est donc nous donner un nom qui ne nous convient pas ; c’est attacher au comité une défaveur qui pourrait nuire à la confiance dont il est investi, et dont il a besoin ; c’est enfin changer ses éléments, et nous reporter, nous, individus qui le composons, hors de la Convention, pour nous ranger dans la classe des agents exécutifs. Je m’oppose donc à la motion et je demande qu’elle ne reparaisse plus.

La proposition est rejetée.