Projet de loi sur la police de sûreté, la justice criminelle, etl'institution des jurés, présenté au nom des comités de constitution et de jurisprudence criminelle


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Projet de loi sur la police de sûreté, la justice criminelle, et l'institution des jurés, présenté au nom des comités de constitution et de jurisprudence criminelle, par Adrien Duport, député de Paris. Imprimé par ordre de l'assemblée nationale. À Paris, de l'imprimerie nationale. 1790.

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Projet de loi sur la police de sûreté, la justice, criminelle, et l'institution des jurés.

 

De la police de sureté

 

Titre premier. De l'institution des officiers de police.

 

Article premier.

La Police de Sûreté sera exercée par les Officiers qui vont être indiqués, concurremment entr'eux, sauf les attributions particulières qui pourront être faites à chacun d'eux.

II.

Le Juge de Paix de chaque Canton sera chargé des fonctions de la Police de Sûreté ; il y aura dans chaque Département un certain nombre d'Officiers de la Maréchaussée chargés d'exercer, concurremment avec les Juges de paix, les fonctions de la Police.

III.

Les Officiers de Police auront le droit de faire agir la force publique pour l'exécution de leursmandats.

Nota. Il sera fait incessamment un rapport particulier sur l'établissement des Maréchaussées.

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Titre II. Du mandat d'amener, et du mandat d'arrêt.

 

Article premier.

Tout Officier de Police aura droit, dans les cas déterminés ci-après, de donner un ordre pour faire comparaître devant lui les prévenus de crime ou délit ; cet ordre s'appellera mandat d'amener.

II.

Le mandat d'amener sera signé de l'Officier de Police, et scellé de son sceau, le prévenu y sera nommé ou désigné le plus clairement qu'il sera possible, il sera exécutoire partout le Royaume, aux conditions prescrites par les articles IX et X du Titre V, et copie en sera laissée à celui qui est désigné dans le mandat.

III.

Le mandat d'amener contiendra l'ordre d'amener l'inculpé devant l'Officier de Police, et de le conduire d'abord, s'il le demande, devant la Municipalité du lieu où il sera trouvé.

IV.

Le porteur du mandat d'amener sera tenu de demander d'abord à l'inculpé s'il entend obéir au mandat. Si celui-ci répond qu'il est prêt d'obéir, de ce moment, et s'il obéit, il sera sous la protection de la Loi, et il ne pourra être usé envers lui d'aucune menace ou violence quelconque,[p.5] sous peine, contre ceux qui s'en rendroient coupables, d'être poursuivis criminellement.

V.

Aucun Citoyen ne peut refuser de venir rendre compte aux Officiers publics des faits qu'on lui impute, et s'il néglige ce devoir, il se rend coupable de désobéissance envers la société.

VI.

Si l'inculpé refuse d'obéir, ou si, après avoir déclaré qu'il est prêt d'obéir, il tente de s'évader, le porteur du mandat d'amener pourra employer la force pour le contraindre ; mais il sera tenu d'en user avec modération et humanité,

VII.

Le porteur du mandat d'amener conduira d'abord l'inculpé, s'il le demande, devant le Maire, ou à son défaut, un autre Officier Municipal du lieu où il a été trouvé, et dans ce cas il présentera le mandat à cet Officier, et le fera viser par lui.

VIII.

Si l'Officier de Police devant qui l'inculpé est amené, trouve, après l'avoir entendu, qu'il y a lieu à le poursuivre criminellement, il donnera ordre qu'il soit envoyé à la maison d'arrêt du Tribunal de District : cet ordre s'appellera mandat d'arrêt.

IX.

Le mandat d'arrêt sera également signé et scellé de l'Officier de Police, lequel tiendra registre de tous ceux qu'il délivrera ; il sera remis à celui qui doit conduire le prévenu en la maison d'arrêt, et copie en sera laissée à ce dernier.

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X.

Le mandat d'arrêt contiendra le nom du prévenu et son domicile, s'il l'a déclaré, ainsi que le sujet de l'arrestation, faute de quoi le gardien de la maison d'arrêt ne pourra le recevoir, sous peine d'être poursuivi comme coupable de détention arbitraire.

XI.

Aucun dépositaire de la force publique ne pourra entrer dans la maison d'un citoyen, pour quelque motif que ce soit, sans un mandat de Police ou ordonnance de Justice.

 

Titre III. Fonctions particulières de l'officier de la maréchaussée.

 

Article premier.

Tous ceux qui auront connoissance d'un meurtre ou d'une mort dont la cause est inconnue et suspecte, seront tenus d'en donner avis sur-le-champ a la Police, dans la personne de l'Officier de Maréchaussée du lieu, ou à son défaut, du plus voisin, lequel se rendra incontinent sur les lieux.

II.

Dans les cas énoncés dans l'article précédent, l'inhumation du mort ne pourra être faite qu'après que l'Officier de la Maréchaussée se sera rendu[p.7] sur les lieux, et aura dressé un procès-verbal détaillé de l'état du cadavre, et de toutes les circonstances, en présence de deux Notables au moins, qui signeront l'acte avec lui.

III.

L'Officier de Police, assisté des Notables, entendra les parens, amis, voisins ou domestiques du décédé, ou ceux qui se sont trouvés en sa compagnie avant son décès, il tiendra note sur-le-champ de leurs déclarations, et les interpellera de les signer.

IV.

L'Officier de Police défendra que qui que ce soit sorte de la maison ou s'éloigne du lieu dans lequel le mort aura été trouvé, et ce jusqu'à la clôture du Procès-verbal et des déclarations, à peine contre les contrevenans d'être saisis sur-le-champ, et poursuivis comme prévenus du délit.

V.

L'Officier de Police fera saisir sur-le-champ celui ou ceux qui seront prévenus d'avoir été les auteurs ou complices du meurtre, et après les avoir entendus, il pourra les faire conduire à la maison d'arrêt du Tribunal de District, pour l'accusation être présentée au Juré, ainsi qu'il va être dit plus bas.

VI.

En cas qu'ils ne puissent être saisis sur-le-champ, 1 Officier de Police donnera un mandat d'amener pour les faire comparaître devant lui.

VII.

Dans le cas de meurtre ou de mort dont la cause est inconnue et suspecte, s'il y a indice de crime,[p.8] l'Officier de Maréchaussée sera personnellement tenu de faire les premières poursuites, sans attendre aucune réquisition, et sans y préjudicier.

VIII.

Lorsque le Juge de Paix du Canton aura été averti dans les cas ci-dessus, il sera également tenu de s'y transporter aussitôt, et de procéder dans la forme qui vient d'être prescrite.

 

Titre IV. Du flagrant-délit.

 

Article premier.

Lorsqu'un Officier de Police apprendra qu'il se commet un délit grave dans un lien, ou que la tranquillité publique y aura été violemment troublée, il sera tenu de s'y transporter aussitôt, d'y dresser procès-verbal détaillé du corps du délit, quel qu'il soit, et de toutes ses circonstances ; enfin de tout ce qui peut servir à conviction ou à décharge.

II.

En cas de flagrant-délit, ou sur la clameur publique, l'Officier de Police fera saisir et amener devant lui les prévenus, sans attendre les déclarations des témoins ; et si les prévenus ne peuvent être saisis, il délivrera un mandat d'amener pour les faire comparoître devant lui.

III.

Tout dépositaire de la force publique, et même[p.9] tout citoyen, sera tenu de s'employer pour saisir un homme trouvé en flagrant-délit, ou poursuivi par la clameur publique comme coupable d'un délit, et l'amener devant l'Officier de Police le plus, voisin.

IV.

Tout homme fortement soupçonné d'être coupable d'un délit déjà dénoncé, comme dans le cas où on le trouveroit saisi d'effets volés ou d'instrumens servans à faire présumer qu'il est auteur du délit, sera amené devant l'Officier de Police, par tout dépositaire de la force publique, et même par tout Citoyen, sauf à ce dernier à être responsable de sa méchanceté.

V.

L'Officier de Police recevra les éclaircissemens donnés par les prévenus, et s'il les trouve suffisans pour détruire les inculpations formées contre eux, il ordonnera qu'ils soient remis sur-le-champ en liberté.

VI.

Si le prévenu n'a pas détruit les inculpations, il en sera usé à son égard ainsi qu'il sera statué ci-après.

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Titre V. De la dénonciation du tort personnel ou de la plainte.

 

Article premier.

Tout particulier qui se prétendra lésé par le délit d'un autre particulier, pourra porter ses plaintes à la Police, devant un Juge de Paix ou Officier de Maréchaussée.

II.

La dénonciation du tort personnel, ou la plainte, pourra être rédigée par la partie, ou son fondé de procuration spéciale, ou par l'Officier de Police, s'il en est requis.

III.

La plainte sera signée & datée par l'Officier de Police ; elle sera également signée & affirmée par celui qui l'aura faite, ou par son fondé de procuration spéciale. Il sera fait mention expresse de leur signature ou de leur refus de signer, à peine de nullité.

IV.

Celui qui aura porté plainte, aura vingt-quatre heures pour s'en désister, auquel cas elle sera biffée & anéantie ; à moins que l'Officier de Police n'ait jugé convenable de la prendre pour dénonciation ; ce qu'il sera tenu de faire dans tous les délits qui intéressent le public.

V.

L'Officier de Police qui aura reçu la plainte, tiendra également note de la déclaration sommaire[p.11]des témoins produits par l'auteur de cette plainte. Il sera tenu aussi d'ordonner que les personnes & les lieux seront visités, & qu'il en sera dressé procès-verbal toutes les fois qu'il s'agira d'un délit dont les traces peuvent être constatées.

VI.

Dans le cas où l'Officier de Police qui a reçu la plainte est celui du lieu du délit, il pourra, d'après les charges, délivrer un mandat d'amener contre le prévenu, pour l'obliger à comparoître, & de lui fournir des éclaircissemens sur le fait qu'on lui impute.

VII.

Néanmoins, en vertu du mandat d'amener, le prévenu ne pourra être contraint à venir, que s'il est trouvé dans les deux jours de la date du mandat, à quelque distance que ce puisse être ; ou passé les deux jours, s'il est trouvé dans la distance de dix lieues du domicile de l'Officier qui l'a signé.

VIII.

Si, après les deux jours, le prévenu est trouvé au-delà des dix lieues, il en sera donné avis à l'officier de Police qui a signé le mandat ;& le prévenu sera seulement gardé à vue, jusqu'à ce que le Juré ait prononcé s'il y a lieu ou non à accusation à son égard.

IX.

Pour cet effet, quatre jours après la délivrance du mandat d'amener, si le prévenu n'a pas comparu devant l'Officier qui l'a signé ; celui-ci enverra copie de la plainte, & la note des déclarations des témoins, au greffe du Tribunal de District, [p.12]pour y être procédé ainsi qu'il sera prescrit ci-après.

X.

Si néanmoins le prévenu est trouvé saisi des effets volés, ou d'instrumens servans à faire présumer qu'il est l'auteur du délit, il sera amené sur le champ devant l'Officier de Police qui aura signé le mandat d'amener, quels que soient la distance & le délai dans lesquels il aura été saisi.

XI.

Dans le cas où l'Officier de Police qui a reçu la plainte n'est pas celui du lieu du délit, mais seulement celui de la résidence habituelle ou momentanée du prévenu, il pourra toujours donner un mandat d'amener devant lui ;& après les quatre jours, si le prévenu n'est pas comparu ou amené, l'affaire avec toutes les pièces sera également renvoyée au, greffe du Tribunal de District du lieu du délit.

XII.

Enfin, dans le cas où l'Officier de Police qui a reçu la plainte n'est ni celui du lieu du délit, ni celui de la résidence du prévenu, il sera tenu de renvoyer l'affaire avec toutes les pièces devant le Juge de Paix du lieu du délit, pour qu'il soit déterminé par celui-ci s'il y a lieu ou non à délivrer le mandat d'amener.

XIII.

Lorsque le prévenu comparoîtra pardevant l'Officier de Police, il sera examiné sur le champ, ou au plus tard dans les vingt-quatre heures ;& s'il résulte des éclaircissemens qu'il n'y a aucun sujet d'inculpation contre lui, l'Officier de Police le renverra en liberté.[p.13]

XIV.

Lorsque le prévenu ne donnera pas des éclaircissemens suffisans pour détruire les inculpations, alors si le délit est de nature à mériter peine afflictive, l'Officier de Police, soit celui du lieu du délit, soit celui de la résidence du prévenu, délivrera un mandat d'arrêt pour faire conduire à la maison d'arrêt du District du lieu du délit.

XV.

Si le délit est de nature à mériter une peine infamante, le prévenu sera également envoyé à la maison d'arrêt ; à moins qu'il ne fournisse caution suffisante de se représenter lorsqu'il en sera besoin, auquel cas il sera laissé à la garde de ses amis qui l'auront cautionné.

XVI.

Si le délit n'est pas de nature à mériter peine afflictive ni infamante, le prévenu ne pourra être conduit à la maison d'arrêt ; mais celui qui a porté plainte à la Police, sera renvoyé à se pourvoir par la voie civile. L'Assemblée Nationale se réserve de régler ce qui concerne les mendians & vagabonds, & les punitions correctionnelles qui pourront être prononcées par l'Officier de Police.

XVII.

Le refus de l'Officier de Police de délivrer un mandat d'amener ou un mandat d'arrêt contre un prévenu n'étant qu'une décision provisoire de la Police, celui qui a porté sa plainte, pourra se pourvoir ultérieurement ainsi qu'il sera prescrit ci-après.

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Titre VI. De la dénonciation civique.

 

Article premier.

Tout homme qui aura été témoin d'un attentat, soit contre la liberté & la vie d'un autre homme, soit contre la sûreté publique ou individuelle, sera tenu d'en donner aussitôt avis à l'Officier de Police du lieu du délit.

II.

L'Officier de Police demandera au dénonciateur s'il est prêt ou non à signer & affirmer sa dénonciation, & s'il veut donner caution de la poursuivre.

III.

Si le dénonciateur signe sa dénonciation, l'affirme & donne caution de la poursuivre, le Juge sera tenu d'ordonner aux témoins qu'il indiquera, de venir faire devant lui leur déclaration sommaire.

IV.

Sur cette déclaration sommaire, le dénonciateur pourra demander à l'Officier de Police un mandat d'amener le prévenu, lequel mandat ne pourra être refusé.

V.

Il sera observé à l'égard de la dénonciation civique ce qui est porté dans les articles IV, V, VII, VIII, IX, X du titre de la dénonciation du tort personnel, ou de la plainte.

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VI.

Si les éclaircissemens donnés par le prévenu ne détruisent pas l'inculpation, l'Officier de Police sera tenu d'envoyer le prévenu à la maison d'arrêt, ou de le recevoir à caution, si le délit n'est pas de nature à emporter peine afflictive.

VII.

Si les éclaircissemens donnés détruisent l'inculpation, l'officier de Police renverra le dénoncé en liberté, sauf au dénonciateur à se pourvoir devant le Juré, à présenter son accusation ainsi qu'il sera prescrit plus bas, & sauf au dénoncé à se pourvoir en dommages & intérêts.

VIII.

Si le dénonciateur refuse de signer & d'affirmer sa dénonciation, ou s'il ne donne pas caution de la poursuivre, l'officier de Police ne sera pas tenu d'y avoir égard ; il pourra néanmoins d'office prendre connoissance des faits, entendre les témoins &, s'il y a lieu, mander le prévenu, & l'envoyer à la maison d'arrêt, sauf à en être personnellement responsable, s'il est prouvé qu’il ait agi avec haine ou passion.

Fin de la Police.

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De la Justice.

 

Titre premier. De la procédure devant le tribunal de district, & du juré d'accusation.

 

Article premier.

Il sera désigné dans chaque Tribunal de District un Juge pour remplir, dans les matières criminelles, les fonctions qui vont être désignées.

II.

Ce Juge s'appellera Directeur du Juré : il sera pris à tour de rôle, tous les six mois, parmi les membres composans le Tribunal de District, le Président excepté.

III.

Celui qui, sur le mandat d'arrêt d'un Officier de Police, aura fait, au gardien de la maison d'arrêt, remise du prévenu, en prendra reconnoissance : il remettra les pièces au Greffier du Tribunal, et en prendra pareillement reconnoissance : il rapportera à l'Officier de Police ces deux actes, visés dans le jour par le Directeur du Juré.

IV.

Aussitôt après avoir délivré son visa, ou, au[p.17]plus tard, dans les vingt-quatre heures, le Directeur du Juré entendra le prévenu, et examinera les pièces remises, pour vérifier si l'inculpation est de nature à être présentée au Juré.

V.

Aucun acte d'accusation ne pourra être présenté au Juré, que pour un délit emportant peine afflictive ou infamante.

VI.

Dans le cas où il n'y a point de partie plaignante ou dénonciatrice, soit que l'accusé soit présent ou non, si le Directeur du Juré trouve, par la nature du délit, que l'accusation ne doit pas être présentée au Juré, il assemblera, dans les vingt-quatre heures, le Tribunal, lequel prononcera sur cette question après avoir entendu le Commissaire du Roi.

VII.

Si, dans le même cas, il trouve que, par la nature du délit, l'accusation doit être présentée au Juré; ou si, contre son opinion, le Tribunal l'a décidé ainsi, il dressera l'acte d'accusation.

VIII.

Dans le cas où il y a une partie plaignante ou dénonciatrice, le Directeur du Juré ne pourra ni dresser l'acte d'accusation, ni porter au Tribunal la question mentionnée en l'article VI, si ce n'est après deux jours révolus depuis la remise du prévenu en la maison d'arrêt, ou des pièces au greffe du Tribunal ; mais ce délai passé sans que la partie ait comparu, il sera tenu d'agir ainsi qu'il est prescrit par les articles précédens.

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IX.

Lorsqu'il y aura une partie plaignante ou dénonciatrice, et qu'elle se présentera au Directeur du Juré par elle-même ou par un fondé de procuration spéciale dans le susdit délai de deux jours, l'acte d'accusation sera dressé de concert avec elle.

X.

Si le Directeur du Juré et la Partie ne peuvent s'accorder soit sur les faits, soit sur la nature de l'accusation, chacun d'eux pourra rédiger séparément son acte d'accusation.

XI.

Si le Directeur du Juré ne trouve pas le délit de nature à être présenté au Juré, la partie pourra néanmoins dresser seule son acte d'accusation.

XII.

Les actes d'accusation seront toujours communiqués au Commissaire du Roi avant d'être présentés au Juré ; si le Commissaire du Roi trouve que, d'après la loi, le délit est de nature à mériter peine afflictive ou infamante, il exprimera son adhésion par ces mots : La loi autorise. Au cas contraire, il exprimera son opposition par ceux-ci : La loi défend. Dans ce dernier cas, la question pourra être portée au Tribunal de District, qui la décidera dans les vingt-quatre heures.

XIII.

Dans tous les cas où le corps du délit aura pu être constaté par un procès-verbal, il sera nécessaire de le joindre à l'acte d'accusation pour être présenté conjointement devant le Juré.

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XIV.

L'acte d'accusation contiendra le fait et toutes ses circonstances : celui ou ceux qui en sont l'objet y seront clairement désignés : la nature du délit y sera déterminée aussi précisément qu'il sera possible.

XV.

Dans tous les cas ci-dessus énoncés, s'il résulte un acte d'accusation, le Directeur du Juré fera assembler les Jurés dans la forme qui sera déterminée au titre X.

XVI.

Les Jurés étant assemblés au jour indiqué, le Directeur du Juré leur fera prêter d'abord, en présence du Commissaire du Roi, le serment suivant :

« Citoyens, vous jurez et promettez d'examiner avec attention les témoins et les pièces qui vous seront présentés, et d'en garder le secret ; vous vous expliquerez avec loyauté sur l'acte d'accusation qui va vous être remis ; vous ne suivrez ni les mouvemens de la haine et de la méchanceté, ni ceux de la crainte ou de l'affection. »

XVII.

Le Directeur du Juré exposera aux Jurés l'objet de l'accusation, et leur expliquera avec clarté et simplicité les fonctions qu'ils ont à remplir : les pièces de la procédure leur seront remises, à l'exception de la déclaration sommaire des témoins ; ensuite ils se retireront seuls dans leur chambre.

XVIII.

Le plus ancien d'âge sera leur chef, les présidera, et sera chargé de recueillir les voix.

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XIX.

Les Jurés liront d'abord les pièces ; ils entendront ensuite les témoins qui seront produits, ainsi que la partie plaignante ou dénonciatrice, si elle est présente : cela fait, ils délibéreront entr'eux.

XX.

S'ils trouvent que l'accusasion doit être admise, ils mettront au bas de l'acte cette formule affirmative : La déclaration du Juré est : oui, il y a lieu. S'ils trouvent que l'accusation ne doit pas être admise, ils mettront au bas de l'acte cette formule négative : La déclaration du Juré est : non, il n’y a pas lieu.

XXI.

Dans le cas mentionné en l'article X, où le Directeur du Juré et la partie plaignante ou dénonciatrice auroient présenté chacun un acte d'accusation différent, les Jurés détermineront celle des deux accusations qui doit avoir lieu, en mettant au bas de l'acte la formule affirmative, et au bas de l'autre acte, la formule négative ; et si aucune des deux accusations ne leur paroît devoir être admise, ils mettront la formule négative au bas des deux actes.

XXII.

S'ils estiment qu'il y a lieu à une accusation, mais différente de celle qui est portée dans l'acte ou les actes d'accusation, ils mettront au bas : La déclaration du Juré est : il n'y a pas lieu à la présente accusation. Dans ce cas, le Directeur du Juré fera entendre devant lui les témoins, à[p.21]l'effet de dresser un nouvel acte d'accusation dans la forme prescrite ci-dessus.

XXIII.

Dans tous les cas, les déclarations des Jurés seront signées par leurs chefs, et remises par lui, en leur présence, au Directeur du Juré, lequel en dressera un acte.

XXIV.

Le nombre de huit Jurés sera absolument nécessaire pour former un Juré d'accusation, et les trois quarts des suffrages pour déterminer qu'il y a lieu à une accusation.

XXV.

Si les Jurés prononcent qu'il n'y a pas lieu à l'accusation, le prévenu sera mis en liberté, et ne pourra plus être poursuivi à raison du même fait, à moins que, sur de nouvelles charges, il ne soit présenté un nouvel acte d'accusation.

XXVI.

Lorsque le Juré d'accusation aura déclaré qu'il y a lieu à accusation, le Directeur du Juré rendra sur-le-champ une ordonnance de prise-de-corps contre l'accusé, d'après laquelle, s'il n'est pas déjà arrêté, il sera saisi en quelque lieu qu'il soit trouvé, et amené devant le Tribunal criminel.

XXVII.

Le nom de l'accusé, ainsi que sa désignation et son domicile, s'il est connu, seront marqués précisément dans l'ordonnance de prise-de-corps ; elle contiendra en outre la copie de l'acte d'accusation, ainsi que l'ordre de conduire directement [p.22]l'accusé en la maison de justice du tribunal criminel.

XXVIII.

S'il n'échoit pas peine afflictive, mais infamante, et que le prévenu n'ait pas été déjà reçu à caution, le Directeur ou Juré rendra contre lui une ordonnance de prise-de-corps, sauf à l'accusé à demander sa liberté, laquelle lui sera accordée en donnant caution.

XXIX.

Si, au contraire, le prévenu a déjà été reçu à caution, l'ordonnance contiendra seulement l'injonction à l'accusé de comparoître à tous les actes de la procédure, et d'élire domicile dans le lieu du tribunal criminel, le tout à peine d'y être contraint par corps.

XXX.

Dans tous les cas, il sera donné copie à l'accusé tant de l'ordonnance de prise-de-corps, ou à l'effet de se représenter, que de l'acte d'accusation.

XXXI.

D'après l'ordonnance de prise-de-corps, si l'accusé ne peut pas être saisi, l'on procédera contre lui, ainsi qu'il sera dit au Titre des Contumaces.

XXXII.

Lorsque le juré d'accusation aura déclaré qu'il n'y a pas lieu à accusation, le directeur du juré en donnera avis à l'officier de police qui a délivré le mandat d'amener afin que dans le cas mentionné dans l'article VIII du titre V de la police, il fasse cesser sur-le-champ toute poursuite ou détention du prévenu.

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Titre II. Formation du tribunal criminel.

 

Article premier.

IL sera établi un tribunal criminel pour chaque département.

II.

Ce tribunal sera composé d'un Président nommé par les électeurs du département, et de deux Juges pris tous les trois mois, et par tour, dans les tribunaux de districts, de telle sorte que le jugement ne pourra être rendu qu'à quatre Juges.

III.

Il y aura près du tribunal criminel un accusateur public, également nommé par les électeurs du département.

IV.

Un Commissaire du Roi sera toujours de service près du tribunal criminel ; ce Commissaire du Roi sera celui du Tribunal de district établi dans la même ville. Dans le cas de maladie ou d'absence forcée, il pourra être suppléé par celui du District le plus voisin.

V.

Il y aura près du Tribunal criminel un Greffier nommé également par les Electeurs du département.

VI.

L'accusateur public sera nommé pour dix ans, le Président pour douze, et le Greffier sera à vie.

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Titre III. Fonctions particulières du président.

 

Article Premier.

Le Président, outre les fonctions de Juge qui lui sont communes avec les autres membres du Tribunal criminel, est de plus personnellement chargé d'entendre l'accusé au moment de son arrivée, de faire tirer au sort les Jurés, de les convoquer, de les diriger dans l'exercice des fonctions qui leur sont assignées par la loi ; de leur exposer l'affaire, même de leur rappeler leur devoir : il présidera à toute l'instruction.

II.

Le Président du Tribunal criminel peut prendre sur lui de faire ce qu'il croira utile pour découvrir la vérité, et la loi charge son honneur et sa conscience d'employer tous ses efforts pour en favoriser la manifestation.

 

Titre IV. Fonctions de l'accusateur public.

 

Article premier.

L'Accusateur public sera principalement chargé de poursuivre les délits sur les actes d'accusation admis par les premiers Jurés.

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II.

Il sera également chargé de suivre l'exécution des ordres qui pourront lui être adressés par la législature et par le Roi pour la poursuite des crimes.

III.

Dans le cas où la recherche de quelques crimes, autres que le crime de lèse-nation, aura été ordonnée par la Législature ou par le Roi, les ordres seront adressés directement à l'accusateur public ; il les transmettra aux officiers de police, et veillera à ce qu'ils soient exécutés par les voies et suivant les formes ci-dessus établies.

IV.

L'accusateur public aura la surveillance sur tous les officiers de police du département : en cas de négligence de leur part, il pourra les avertir ou les réprimander ; en cas de faute plus grave, il pourra les déférer au Tribunal criminel, lequel, selon la nature du délit, prononcera les peines correctionnelles déterminées par la loi.

V.

Si l'accusateur public trouve qu'un officier de police soit dans le cas d'être poursuivi pour prévarication dans ses fonctions, il pourra le mander, recevoir ses éclaircissemens; et, s'il y a lieu, donner au directeur du Juré la notice des faits, les pièces et la déclaration des témoins, pour que celui-ci dresse acte d'accusation, et le présente au Juré, dans la forme ci-dessus prescrite.

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Titre V. Des fonctions du commissaire du roi.

 

Article premier.

Dans tous les procès criminels, soit au Tribunal de district, soit au Tribunal criminel, le Commissaire du Roi prendra communication de toutes les pièces et actes, et assistera à l'instruction.

II.

Le Commissaire du Roi pourra toujours faire aux Juges, au nom de la loi, toutes les réquisitions qu'il jugera convenables, desquelles il lui sera délivré acte.

III.

Lorsque le directeur du Juré, ou le Tribunal criminel, n'auront pas jugé à propos de déférer à la réquisition du Commissaire du Roi, l'instruction ni le jugement n'en pourront être ni arrêtés, ni suspendus, sauf au Commissaire du Roi du Tribunal criminel à former sa demande en cassation après le jugement, ainsi qu'il va être détaillé ci-après.

 

Titre VI. Procédure devant le tribunal criminel.

 

Article premier.

Nul homme ne pourra être poursuivi criminellement et jugé que sur une accusation reçue par un Juré, composé de huit citoyens.

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II.

Si le Juré a déclaré qu'il y a lieu à accusation, le procès et l'accusé, dans le cas où il sera détenu, seront envoyés, par les ordres du Commissaire du Roi, au Tribunal criminel du département, et ce dans les vingt-quatre heures de la signification qui lui aura été faite de l'ordonnance de prise-de-corps.

III.

Néanmoins, dans les deux cas ci-après : savoir, si le Juré d'accusation est celui du lieu où est établi le Tribunal criminel, ou si l'accusé est domicilié dans le District où siège le Tribunal, l'accusé aura le droit de demander à être jugé par l'un des Tribunaux criminels des deux départemens les plus voisins.

IV.

L'accusé ne pourra cependant exercer ce droit, qu'autant que le Tribunal criminel qu'il est autorisé à décliner dans les deux cas ci-dessus, se trouve établi dans une ville au-dessous de 40,000 âmes.

V.

Lorsque l'accusé se trouvera dans l'un des deux cas mentionnés dans l'article III ci-dessus, l'ordonnance de prise-de-corps, après avoir énoncé l'ordre de le conduire dans la maison de justice du Tribunal criminel du département, dénommera en outre les villes des deux Tribunaux criminels les plus voisins, entre lesquels l'accusé pourra opter.

VI.

Dans les cas mentionnés ci-dessus, si l'accusé[p.28]est détenu dans la maison d'arrêt, il notifiera au greffe son option dans les vingt-quatre heures de la signification qui lui aura été faite de l'acte d'accusation : après lequel temps il sera envoyé à la maison de justice, soit du Tribunal direct, soit de celui qu'il aura choisi.

VII.

Si, dans les mêmes cas, l'accusé n'avoit pu être saisi sur le mandat d'envoi de l'officier de police, mais seulement en vertu de l'ordonnance de prise-de-corps, il sera conduit, par celui qui en est porteur, devant le Juge de paix du lieu où il sera trouvé, pour y passer la déclaration de l'option dont il vient d'être parlé, ou de son refus de la faire, de laquelle déclaration le Juge de paix gardera minute et délivrera expédition au porteur de l'ordonnance.

VIII.

Le porteur de l'ordonnance, après avoir remis l'accusé dans la maison de justice du Tribunal direct, ou de celui qu'il aura choisi, remettra également au greffe la déclaration de l'accusé ainsi que l'ordonnance de prise-de-corps.

IX.

Le Greffier donnera connoissance de ces deux actes à l'accusateur public ; et si le Tribunal que l'accusé a préféré, n'est pas le Tribunal direct, l'accusateur public fera notifier ces actes au greffe de ce dernier Tribunal ; et sur la réquisition qu'il en fera par l'acte même de notification, les pièces lui seront renvoyées.

X.

Dans tous les cas, vingt-quatre heures au plus[p.29]tard après l'arrivée de l'accusé et la remise des pièces au greffe, il sera entendu par le Président, en présence de l'accusateur public et du Commissaire du Roi ; le Greffier tiendra note de ses réponses, laquelle sera remise au Président pour servir de renseignement seulement.

XI.

Tout accusé pourra faire choix d'un ou deux amis, ou conseil pour l'aider dans sa défense, sinon le Président lui désignera un conseil ; mais il ne pourra jamais communiquer avec l'accusé que deux jours après qu'il aura été amené.

XII.

Le premier de chaque mois, le Président du Tribunal criminel fera tirer au sort douze Jurés sur la liste, de laquelle il sera parlé au titre XI.

XIII.

Le 15 de chaque mois, s'il y a quelqu'affaire à juger, le Juré de jugement s'assemblera sur la convocation qui en sera faite.

XIV.

L'accusateur public sera tenu, aussitôt après l'interrogatoire, de faire ses diligences de manière que l'accusé puisse être jugé à la première assemblée du Juré qui suivra son arrivée.

XV.

Si l'accusateur public ou l'accusé ont des motifs de demander que l'affaire ne soit pas portée à la première assemblée du Juré, ils présenteront leur requête en prorogation de délai au Tribunal criminel, lequel décidera si cette prorogation doit être accordée.

[p.30]

XVI.

Si le Tribunal criminel juge qu'il y a lieu d'accorder la demande, ce délai ne pourra néanmoins être prorogé au-delà de l'assemblée de Jurés, qui aura lieu le 15 du mois suivant.

XVII.

La requête en prorogation de délai sera présentée avant le 5 de chaque mois, époque de la convocation du Juré.

XVIII.

Le nombre de douze Jurés sera absolument nécessaire pour former un Juré de jugement.

XIX.

Le Juge, en présence du public et du Commissaire du Roi, fera prêter à chaque Juré séparément le serment suivant : « Citoyen, vous jurez et promettez d'examiner avec l'attention la plus scrupuleuse les charges portées contre un tel … de n'écouter ni la haine ou la méchanceté, ni la crainte ou l'affection ; de vous décider d'après les témoignages et suivant votre conscience et votre intime et profonde conviction, avec l'impartialité et la fermeté qui conviennent à un homme libre. »

XX.

Le serment prêté, les Jurés prendront place tous ensemble sur des sièges séparés du public et des parties, et ils seront placés en face de l'accusé et des témoins.

XXI.

De ce moment, ils ne pourront communiquer[p.31]avec personne par écrit, parole ou geste, jusqu'à ce qu'ils aient fait leur déclaration, sauf les éclaircissemens qu'ils pourront demander, suivant la forme qui va être expliquée.

 

Titre VII. De l'examen et de la conviction.

 

Article premier.

En présence des Juges, de l'Accusateur public, du Commissaire du Roi, des Jurés et du Public, l'accusé comparoîtra à la barre, libre et sans fers ; le Président lui dira qu'il peut s'asseoir, lui demandera son nom, âge, profession et demeure, dont il sera tenu note par le Greffier.

II.

Le Président avertira l'accusé d'être attentif à tout ce qu'il va entendre ; il ordonnera au Greffier de lire l'acte d'accusation : après quoi il rappellera clairement à l'accusé ce qui y est contenu ; il lui dira : « Voilà de quoi vous êtes accusé ; vous allez entendre les charges qui seront produites contre vous. »

III.

L'Accusateur public, ainsi que la partie plaignante, s'il y en a, feront entendre leurs témoins : ceux-ci, avant de déposer, prêteront serment de parler sans haine et sans crainte, de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

[p.32]

IV.

La liste des témoins qui doivent déposer, sera notifiée à l'accusé, vingt-quatre heures au moins avant l'examen.

V.

Après chaque déposition, le Président demandera à l'accusé s'il veut répondre à ce qui vient d'être dit contre lui. L'accusé pourra, ainsi que ses amis ou conseils, dire, tant contre les témoins que contre leur témoignage, ce qu'il jugera utile à sa défense ; il pourra les questionner. L'Accusateur public, les Jurés et le Président pourront aussi demander les éclaircissemens dont ils croiront avoir besoin.

VI.

Le témoin sera toujours tenu de déclarer d'abord si c'est de l'accusé présent qu'il entend parler.

VII.

Lorsque les témoins de l'Accusateur public et de la partie plaignante, s'il y en a, auront été entendus, l'accusé pourra faire entendre les siens ; l'Accusateur public ou la partie plaignante pourront également les questionner et dire sur eux ou leur témoignage tout ce qu'ils jugeront nécessaire.

VIII.

Les témoins ne pourront jamais s'interpeller entr'eux.

IX.

L'Accusé, ainsi que ses amis ou conseils, pourra demander que les témoins produits contre lui soient introduits et entendus séparément, même après qu'ils auront déposé ; il pourra demanderencore[p.33] encore que ceux qu'il désignera se retirent de l'auditoire, et qu'un ou plusieurs d'entr'eux soient introduits et entendus de nouveau, séparément ou en présence les uns des autres.

X.

L'Accusateur public aura la même faculté à l'égard des témoins produits par l'Accusé.

XI.

L'Accusé pourra faire entendre des témoins pour prouver qu'il est homme d'honneur et de probité, incapable de commettre le crime qu'on lui impute. Les Jurés auront tel égard que de raison à ces témoignages.

XII.

Pendant l'examen, les Jurés et les Juges pourront prendre note de ce qui leur paroîtra important, pourvu que la discussion n'en soit ni arrêtée ni ralentie.

XIII.

Ne pourront être entendus en témoignage un père et une mère contre leurs enfans, ni les enfans contre leurs père et mère, aïeul ou aïeule ; un frère et une sœur contre leur frère et sœur, un mari contre sa femme ou une femme contre son mari.

XIV.

Du moment qu'un homme sera arrêté, il est défendu à qui que ce soit de rien imprimer ou publier contre lui, sous peine de punition infamante contre les contrevenans.

XV.

Tous les effets trouvés lors du délit ou depuis, pouvant servir à conviction, seront représentés[p.34]à l'Accusé, et il lui sera demandé de répondre personnellement s'il les reconnoît.

XVI.

A la suite des dépositions, l'Accusateur public sera entendu ; l'Accusé ou ses amis pourront lui répondre ; enfin, le Président fera un résumé de l'affaire, la réduira à ses points les plus simples, fera remarquer aux Jurés les principales preuves pour ou contre l'Accusé : après quoi il leur dira de se retirer dans leur chambre, en leur recommandant de suivre leur conscience, de décider avec impartialité, et de déclarer ce qu'ils trouveront, en gens d'honneur et de probité, être la vérité.

XVII.

Cela fait, il ordonnera que l'Accusé ou les Accusés soient reconduits à la maison de justice.

XVIII.

Lorsque les Jurés seront retirés seuls dans leur chambre, ils délibéreront entr'eux.

XIX.

Les Jurés seront tenus de délibérer d'abord et d'aller aux voix sur le point de savoir s'ils trouvent le fait constant ou non ; s'il résulte de la délibération que le fait est constant, ils passeront de suite à une seconde délibération, et iront aux voix sur le point de savoir si l'Accusé ou les Accusés sont convaincus de l'avoir commis.

XX.

Les cinq sixièmes des voix seront absolument nécessaires, soit pour déclarer que le délit est[p.35] constant, soit pour déclarer que l'Accusé est convaincu.

XXI.

Les Jurés seront tenus de prononcer, par une seule et même déclaration, sur tous les Accusés compris dans le même acte d'accusation, en commençant toujours par le principal Accusé, s'il y en a un.

XXII.

Le Juré ne pourra prononcer que sur ce qui est porté dans l'acte d'accusation, quelle que soit la déposition des témoins ; il pourra cependant prononcer en atténuation du même genre du délit par exemple : Si un homme est accusé d'assassinat ou de meurtre, il pourra déclarer qu'il est convaincu d'homicide à son corps défendant seulement ; s'il est accusé de vol avec effraction, il pourra déclarer qu'il est convaincu de vol simple, etc.

XXIII.

Le Juré sera compétent pour décider non-seulement du fait matériel, mais encore s'il a été commis malicieusement ou non, avec ou sans intention de nuire, involontairement ou à dessein ;ainsi il pourra déclarer qu'un tel..estconvaincu d'un homicide involontaire seulement, ou à son corps défendant, etc.

XXIV.

Lorsque les Jurés auront fini de délibérer, ils feront avertir le Président, et rentreront immédiatement dans l'auditoire.

XXV.

Le Président leur demandera s'ils ont suivi, dans[p.36] leur décision, les régies établies par la Loi pour leur délibération ; il dira à chacun d'eux de le jurer : après quoi il s'adressera au chef du Juré, et il lui demandera quelle est la déclaration du Juré celui-ci lui dira : « Sur mon honneur et ma probité la déclaration du Juré est que, etc. »

XXVI.

La déclaration du Juré sera toujours positive et simple ; elle portera : « Le délit énoncé dans l'acte d'accusation est prouvé, ou n'est pas prouvé : un tel … n'est pas convaincu ; un tel … est convaincu d'avoir fait telle chose volontairement, ou involontairement ; malicieusement, ou non ; avec ou sans intention de nuire.

XXVII.

Le Greffier recevra la déclaration des Jurés par l'organe de leur chef, et en leur présence il l'inscrira sur le registre du tribunal ; elle sera signée de lui et du Président : après quoi les Jurés se retireront, et leur fonction sera finie.

XXVIII.

Si l'Accusé est déclaré non convaincu du fait porté dans l'acte d'accusation, et qu'il ait été inculpé sur un autre par les dépositions des témoins, l'Accusateur public pourra demander au Président de faire arrêter le prévenu. À l'occasion du nouveau fait, le Président, après avoir pris du prévenu les éclaircissemens qu'il voudra donner, pourra, s'il y a lieu, le renvoyer devant un Juré d'accusation avec les témoins, pour être procédé à une nouvelle accusation.

XXIX.

Dans ce cas, le Juré d'accusation pourra être[p.37] celui du District dans le chef-lieu duquel siège le tribunal criminel.

XXX.

Si l'Accusé est convaincu du fait porté dans l'acte d'accusation, il ne pourra jamais être poursuivi pour raison du nouveau fait, qu'autant que celui-ci mériteroit une peine plus forte que le premier ; auquel cas il sera sursis à l'exécution de la première peine jusqu'au jugement de la seconde accusation.

XXXI.

Si la déposition d'un témoin est évidemment fausse, le Président en dressera procès-verbal ; il pourra d'office et sur la réquisition de l'Accusateur public ou de l'Accusé, le faire arrêter sur-le-champ, et le renvoyer pardevant le Juré de District du lieu pour prononcer sur l'accusation, dont l'acte, dans ce cas, sera dressé par le Président lui-même.

 

Titre VIII. Du jugement et de l'exécution.

 

Article premier.

Lorsque l'Accusé aura été déclaré non convaincu, le Président prononcera que l'Accusé est acquitté de l'accusation, et ordonnera qu'il soit mis sur-le-champ en liberté.

[p.38]

II.

Tout particulier, ainsi acquitté, ne pourra plus être repris, ni accusé pour raison du même fait.

III.

Lorsque l'Accusé aura été déclaré convaincu, le Président, en présence du Public, le fera comparoître, et lui donnera connoissance de la déclaration du Juré.

IV.

Sur cela le Commissaire du Roi fera sa réquisition pour l'application de la Loi.

V.

Le Président demandera à l'Accusé, s'il n'a rien à dire pour sa défense ; lui, ses amis ou conseils ne pourront plus plaider que le fait est faux, mais seulement qu'il n'est pas défendu ou qualifié crime par la Loi, ou qu'il ne mérite pas la peine dont le Commissaire du Roi a requis l'application.

VI.

Les Juges prononceront ensuite et sans désemparer la peine établie par la Loi, ou acquitteront l'Accusé, dans le cas où le fait dont il est convaincu, n'est pas défendu par elle.

VII.

Les Juges donneront leur avis à haute voix en présence du Public, en commençant par le plus jeune et finissant par le Président.

VIII.

Si les Juges sont partagés pour l'application de la Loi, l'avis le plus doux passera ; s'il y a plus[p.39] de deux avis ouverts, ou si deux juges sont réunis à l'avis le plus sévère, ils appelleront des Juges du tribunal de District pour les départager.

IX.

Le Président, après avoir recueilli les voix, et avant de prononcer le jugement, lira le texte de la Loi sur laquelle il est fondé.

X.

Le Greffier écrira le jugement, dans lequel sera inséré le texte de la Loi, lu par le Président.

XI.

Lorsque le jugement aura été prononcé à l'Accusé, il sera sursis pendant trois jours à son exécution.

XII.

Le condamné aura le droit de se pourvoir en cassation contre le jugement du tribunal : à cet effet il sera tenu dans le susdit délai de trois jours de remettre sa requête en cassation au Greffier, lequel lui en délivrera reconnoissance. Celui-ci remettra la requête au Commissaire du Roi, qui sera tenu de l'envoyer aussitôt au ministre de la justice, après en avoir délivré reconnoissance au Greffier.

XIII.

Le Commissaire du Roi pourra également demander, au nom de la Loi, la cassation du jugement ; il sera tenu, dans le même délai de trois jours, d'en passer sa déclaration au Greffe.

XIV.

Les demandes en cassation ne pourront être fondées que 6ur la violation des formes prescrites[p.40] à peine de nullité, soit dans l'instruction, soit dans le jugement ou sur la fausse application de la Loi.

XV.

Les requêtes en cassation seront adressées directement au Ministre de la Justice, lequel sera tenu, dans les trois jours, d'en donner avis au Président, et d'en accuser la réception au Commissaire du Roi, qui en donnera connoissance au condamné.

XVI.

Dans le cas où la demande en cassation aura été présentée par le condamné, elle ne pourra être jugée qu'après un mois révolu, à compter du jour de la réception de la requête ; et pendant ce délai le condamné pourra faire parvenir au Tribunal de cassation, par le Ministre de la Justice, les moyens qu'il voudra employer.

XVII.

Le Tribunal de Cassation confirmera ou annullera le jugement. Dans ce dernier cas il exprimera, dans sa décision, le motif de la cassation, et renverra le procès à un autre Tribunal Criminel.

XVIII.

Dans le cas où l'on se pourvoiroit contre le second jugement, si le Tribunal de Cassation trouve qu'il présente les mêmes motifs de cassation, il en référera à la Législature. Celle-ci déclarera quelle est la véritable signification de la Loi ; le Tribunal de Cassation sera tenu d'y conformer sa décision ; et en cas qu'il y ait lieu d'annuller le jugement, il renverra à un nouveau Tribunal Criminel.

[p.41]

XIX.

Le Ministre de la Justice enverra sans délai la décision du Tribunal de Cassation au Président du Tribunal Criminel et au Commissaire du Roi, lequel en donnera connoissance à l'accusé.

XX.

Lorsque le jugement aura été annullé, l'accusé sera toujours renvoyé en personne devant le Tribunal Criminel, indiqué par le Tribunal de Cassation.

XXI.

Dans le cas où le jugement aura été annullé, à raison de fausse application de la Loi, le Tribunal Criminel rendra son jugement sur la déclaration déjà faite par le Juré, après avoir entendu l'accusé ou ses conseils, ainsi que le Commissaire du Roi.

XXII.

Dans le cas où le jugement aura été annullé, à raison de violation ou d'omission de formes importantes dans l'examen et la déclaration du Juré, l'accusé ainsi que les témoins seront de nouveau entendus pardevant des Jurés qui seront assemblés à cet effet.

XXIII.

Passé le délai de trois jours, mentionné en l'article XVI, s'il n'y a point eu de demande en cassation, ou dans les vingt-quatre heures après la réception de la décision qui aura rejeté cette demande, la condamnation sera exécutée.

XXIV.

Cette exécution se fera sur les ordres du Commissaire [p.42] du Roi, qui aura le droit à cet effet de requérir l'assistance de la force publique.

Nota. Il manque ici plusieurs articles sur la prononciation du Jugement et sur la forme de l'exécution. Nous avons cru devoir attendre pour les proposer, que l'Assemblée Nationale, sur le rapport qui lui en sera fait par ses Comités, ait déterminé les différentes peines qui doivent être appliquées aux délits, et sur-tout qu'elle se soit expliquée sur la grande question de la peine de mort.

XXV.

La décision des Jurés ne pourra jamais être soumise à l'appel ; si néanmoins tous les Juges et le Commissaire du Roi étoient unanimement d'accord pour trouver que les Jurés se sont trompés, ils tireront au sort entre eux pour savoir lequel aura le droit de choisir, parmi les Assistans, deux Citoyens éligibles, qui seront adjoints aux douze Jurés pour donner une nouvelle déclaration, à la majorité des six septièmes.

XXVI.

Ce nouvel examen ne pourra avoir lieu que dans, le cas seulement où l'accusé auroit été déclaré convaincu, et jamais lorsqu'il auroit été acquitté.

XXVII.

Le silence le plus absolu sera observé dans l'Auditoire ; les témoins et les défenseurs de l'accusé seront tenus de s'exprimer avec décence et modération. Si quelque particulier s'écartoit du respect dû à la Justice, le Président pourra le reprendre, le condamner à une amende, et même à garder prison jusqu'au terme de huit jours, suivant la gravité du cas.

[p.43]

XXVIII.

Lorsqu'un accusé aura été acquitté, il pourra présenter requête pour obtenir de la Société une indemnité, sur laquelle requête il sera statué par le Tribunal Criminel.

XXIX.

Le Tribunal Criminel sera compétent pour connoître des intérêts civils, résultant des procès criminels.

 

Titre IX. Des contumaces.

 

Article premier.

Si, sur l'ordonnance de prise-de-corps ou de se représenter en justice, l'accusé ne comparoît pas et ne peut être saisi, le Président du Tribunal criminel rendra une ordonnance portant qu'il sera fait perquisition de sa personne, et que chaque citoyen est tenu d'indiquer l'endroit où il se trouve.

II.

Cette ordonnance, avec copie de celle de prise-de-corps, sera affichée à la porte de l'accusé et à son domicile élu, ainsi qu'à la porte de l'église du lieu de son domicile, ou à la porte de l'auditoire pour ceux qui ne sont pas domiciliés ; elle sera également notifiée à ses cautions, s'il en a fourni.

[p.44]

III.

Cette ordonnance sera proclamée dans les lieux ci-dessus énoncés pendant deux dimanches consécutifs, à peine de nullité ; passé ce temps, les biens de l'accusé seront saisis.

IV.

Huitaine après la dernière proclamation, le Président du Tribunal rendra une seconde ordonnance, portant qu'un tel … est déchu du titre de citoyen françois, que toute action en justice lui est interdite pendant tout le temps de sa contumace, et qu'il va être procédé contre lui, malgré son absence. Cette ordonnance sera signifiée, proclamée et affichée aux lieux et dans la même forme que dessus.

V.

Après un nouveau délai de quinzaine, le procès sera continué dans la forme qui est prescrite pour les accusés présens, à l'exception toute_ fois que les dépositions des témoins seront reçues par écrit.

VI.

Aucun conseil ne pourra se présenter pour défendre l'accusé contumax sur le fond de son affaire ; seulement s'il est dans l'impossibilité absolue de se rendre, il enverra, par un fondé de procuration spéciale, son excuse, dont la légitimité pourra être plaidée par ses amis et décidée par le Tribunal

VII.

Dans le cas où le tribunal trouveroit l'excuse légitime, il ordonnera qu'il sera sursis à l'examen et au jugement pendant un temps qu'il fixera, [p.45] eu égard à la nature de l'excuse et à la distance des lieux.

VIII.

Les condamnations qui interviendront contre un accusé contumax, seront exécutées, en les inscrivant dans un tableau qui sera suspendu au milieu de la place publique.

IX.

L'accusé contumax pourra en tout temps se représenter, en se constituant prisonnier, et donnant connoissance au Président de sa comparution ; de ce jour, tous jugemens et procédures faites contre lui seront anéanties, sans qu'il soit besoin, d'aucun jugement nouveau : il en sera de même s'il est repris et arrêté.

X.

Il rentrera également dans tous ses droits civils ; à compter de ce jour, ses biens lui seront rendus, ainsi que les fruits de ceux qui auront été saisis, à la déduction des frais de régie et de ceux du procès.

XI.

Il sera de nouveau procédé à l'examen et au jugement de l'accusé contumax qui se sera représenté ; néanmoins les dépositions écrites des témoins décédés pendant son absence seront produites, pour y avoir tel égard que de raison par les Jurés.

XII.

Dans le cas même d'absolution, l'accusé qui a été contumax, n'obtiendra aucune indemnité ; et le Juge lui fera en public une réprimande pour avoir douté de la justice et de la loyauté de ses[p.46]concitoyens ; il sera de plus condamné, par forme de correction seulement, à garder prison pendant un temps, qui ne pourra excéder un mois.

XIII.

Pendant toute la vie de l'accusé, tant qu'il sera contumax, le produit de ses biens saisis sera versé dans la caisse du District ; néanmoins s'il y a une femme et des enfans, ils pourront demander la distraction à leur profit d'une somme, laquelle sera fixée par le Tribunal criminel.

XIV.

Après la mort de l'accusé, prouvée légalement, ou lorsqu'il a atteint l'âge de 80 ans, ses biens saisis seront restitués à ses héritiers légitimes.

 

Titre X. De la manière de former le juré d'accusation.

 

Article premier.

Le Procureur-Syndic de chaque District formera, tous les trois mois, la liste des citoyens qui doivent servir de Juré dans les accusations ; elle sera envoyée à chacun des membres qui en fera partie.

II.

Cette liste sera composée de trente Citoyens éligibles aux administrations de District et de Département.

[p.47]

III.

Le tribunal de District indiquera celui des jours de la semaine, qui servira à l'assemblée du Juré d'accusation.

IV.

Huitaine avant le jour, ce Directeur du Juré fera tirer au sort, en présence du Commissaire du Roi et du Public, huit Citoyens sur la liste des trente, pour en former le tableau du Juré d'accusation.

V.

S'il y a lieu d'assembler les Jurés d'accusation, ceux qui doivent le composer, seront avertis, quatre jours d'avance, de se rendre au jour fixé, sous peine de 3o liv. d'amende, et d'être privés du droit d'éligibilité et de suffrage pendant deux ans.

VI.

Lorsque les Citoyens inscrits sur la liste des trente, formée par le Procureur-Syndic ; prévoieront pour l'un des jours d'assemblée du Juré quelqu'obstacle qui pourrait les empêcher de s'y rendre, s'il arrivoit qu'ils y fussent appelés par le sort, ils en donneront connoissance au Directeur du Juré deux jours au moins avant celui de la formation du tableau des huit, pour lequel ils désirent d'être excusés.

VII.

La valeur de cette excuse sera jugée dans les vingt-quatre heures par le tribunal de District.

VIII.

Si l'excuse est jugée suffisante, le nom de celui qui l'a présentée, sera retiré du nombre de ceux[p.48]sur lesquels le tableau des huit sera tiré au sort. Si elle est jugée non valable, son nom sera soumis au sort.

IX.

S'il est du nombre des huit désignés par le sort, il lui sera signifié que son excuse a été jugée non-valable, qu'il est sur le tableau des Jurés, et qu'il ait à se rendre au jour fixé pour l'assemblée. Copie de cette signification sera laissée à un des Officiers municipaux du lieu de son domicile.

X.

Tout Juré qui ne se sera pas rendu sur la sommation qui lui en aura été faite, sera condamné aux peines mentionnées dans l'article V. Sont exceptés de la présente disposition ceux qui seroient retenus pour cause de maladie.

XI.

Dans tous les cas, s'il manquoit un des Jurés au jour indiqué, le Directeur du Juré le fera remplacer par un des Citoyens de la Ville, pris au sort dans la liste des trente, et subsidiairement parmi les éligibles.

 

Titre XI. De la manière de former le juré du jugement.

 

Article premier.

Tout Citoyen éligible aux administrations de département et de district se fera inscrire avant le[p.49]15 de décembre, au plus tard de chaque année, comme Juré de jugement, sur un registre qui sera tenu, à cet effet, par le Secrétaire-Greffier de chaque district.

II.

Le Procureur-Syndic du district enverra, dans les quinze derniers jours de décembre, une copie de ce registre au directoire de département, et en fera remettre un exemplaire à chaque Municipalité de son arrondissement.

III.

Ceux qui auront négligé de se faire inscrire pendant le mois de décembre, au plus tard, seront privés des droits de suffrages à toute fonction publique, pendant le cours de l'année suivante.

IV.

Ne pourront être Jurés les Officiers de Police, les Juges, les Commissaires du Roi, l'accusateur public, les Procureurs-généraux-Syndics et Procureurs-Syndics des administrations ; ainsi que tous les Citoyens qui ne sont pas portés sur la liste des éligibles ; les Ecclésiastiques et les septuagénaires en sont dispensés.

V.

Sur tous les Citoyens éligibles inscrits dans les registres des directoires, le Procureur-général-Syndic du Département en choisira, tous les trois mois, deux cents qui formeront la liste du Juré du jugement. Cette liste sera imprimée et envoyée à tous ceux qui la composeront.

VI.

Les deux tiers de la liste, autant qu'il sera possible, [p.50]seront pris parmi les Citoyens de la ville où siège le Tribunal criminel, qui se seront fait inscrire.

VII.

Un Citoyen ne pourra, sans son consentement, être placé plus d'une fois sur la liste, pendant la révolution d'une année ; et si, pendant les trois mois que son nom sera sur la liste, il a assisté à une assemblée de Juré, il pourra s'excuser d'en remplir une seconde fois les fonctions: le tout à moins qu'il n'habite la ville même du Tribunal criminel.

VIII.

Nul ne pourra être Juré de jugement dans la même affaire où il auroit été Juré d'accusation.

IX.

Lorsqu'il s'agira de former, le premier de chaque mois, le tableau des douze Jurés, ainsi qu'il est dit art. XII, tit. IV, le président du Tribunal criminel, en présence du Commissaire du Roi et de deux Officiers Municipaux, lesquels prêteront le serment de garder le secret, présentera à l'accusateur public la liste des deux cents Jurés ; celui-ci aura la faculté d'en exclure vingt sans donner de motif ; le reste des noms sera mis dans le vase, pour être tiré au sort, et former le tableau des douze Jurés.

X.

Le tableau sera présenté à l'accusé, qui pourra récuser ceux qui le composent. Ils seront remplacés par le sort.

XI.

Lorsque l'accusé aura exercé vingt récusations ;[p.51]celles qu'il voudrait présenter ensuite, devront être fondées sur des causes dont le tribunal jugera la validité.

XII.

Cette récusation de vingt Jurés pourra être faite par plusieurs co-accusés, s'ils se concertent ensemble pour l'exercer ; et s'ils ne peuvent s'accorder, chacun d'eux séparément pourra récuser dix Jurés.

XIII.

Dans ce dernier cas, chacun d'eux récusera successivement un des Jurés, jusqu'à ce que sa faculté de récusation soit épuisée.

XIV.

Lorsque les Citoyens inscrits sur la liste des deux cents, formée par le Procureur-Général-Syndic, prévoieront, pour le 15 du mois suivant, quelqu'obstacle qui pourrait les empêcher de se rendre à l'assemblée du Juré, ils en donneront connoissance au Président du Tribunal criminel, deux jours au moins avant le premier du mois, pendant lequel ils désirent être excusés.

XV.

La valeur de cette excuse sera jugée dans les vingt-quatre heures, par le Tribunal criminel.

XVI.

Si l'excuse est jugée suffisante, le nom de celui qui l'a présentée, sera retiré du nombre de ceux sur lesquels le tableau des douze sera tiré au sort ; si elle jugée non valable, son nom sera soumis au sort.

XVII.

S'il est du nombre des douze qui doivent composer[p.52] le Juré, il lui sera signifié que son excuse a été jugée non valable ; qu'il est sur le tableau du Juré, et qu'il ait à se rendre au jour fixé pour l'assemblée du Juré. Copie de cette signification sera laissée en outre aux Officiers Municipaux du lieu de son domicile.

XVIII.

Tout Juré qui ne se sera pas rendu sur la sommation qui lui en aura été faite, sera condamné en 5o livres d'amende, et à être privé du droit d'éligibilité et de suffrage pendant deux ans. Sont exceptés de la présente disposition, ceux qui seroient retenus pour cause de maladie.

XIX.

Dans tous les cas, s'il manquoit un des Jurés au jour indiqué, le directeur du Juré le fera remplacer par un des Citoyens de la ville, pris au sort dans la liste des deux cents.

 

Titre XII. Des prisons et maisons d'arrêts.

 

Article premier.

Il y aura auprès de chaque Tribunal de District une maison d'arrêt pour y retenir ceux qui y seront envoyés par un mandat d'Officier de Police, & auprès de chaque Tribunal criminel une maison de justice pour détenir ceux contre lesquels il sera intervenu une ordonnance de prise-de-corps, indépendamment [p.53]des prisons qui pourront être établies comme peine.

II.

Les Procureurs-Généraux-Syndics veilleront, sous l'autorité des Directoires, à ce que ces différentes maisons soient non-seulement sûres, mais propres & saines, de manière que la santé des personnes détenues ne puisse être aucunement altérée.

III.

La garde de ces maisons sera donnée par le Directoire, sur la présentation de la Municipalité du lieu, à des hommes d'un caractère & de mœurs irréprochables, lesquels prêteront serment de veiller à la garde de ceux qui leur seront remis, & de les traiter avec douceur & humanité.

IV.

Les gardiens de maisons d'arrêt, maisons de justice, ou geôliers de prisons seront tenus d'avoir un registre signé & paraphé à toutes les pages par le Président du Tribunal.

V.

Tout exécuteur de mandat d'arrêt, d'ordonnance de prise-de-corps, ou de jugement de condamnation à prison, sera tenu, avant de remettre la personne qu'il conduit, de faire inscrire en sa présence sur le registre l'acte dont il est porteur. L'acte de remise sera écrit de suite. Le tout sera signé tant par lui que par le gardien ou geôlier, qui lui en donnera copie signée pour sa décharge.

VI.

Nul gardien ou geôlier ne pourra recevoir ou retenir [p.54]aucun homme, qu'en vertu des mandats, ordonnances ou jugements dont il vient d'être parlé, à peine d'être poursuivi comme coupable du crime de détention arbitraire.

VII.

Le registre ci-dessus mentionné contiendra également, en marge de l'acte de remise, la date de la sortie du détenu, ainsi que l'ordonnance ou le jugement en vertu desquels elle a eu lieu.

VIII.

Dans toutes les villes où il y aura soit une maison d'arrêt, soit une maison de justice, soit une prison, un des Officiers municipaux du lieu sera tenu de faire, au moins deux fois par semaine, la visite de ces maisons.

IX.

L'Officier municipal veillera à ce que la nourriture des détenus soit suffisante & saine ;&, s'il s'apperçoit de quelque tort à cet égard contre la justice ou l'humanité, il sera tenu d'y pourvoir par lui-même, ou d'y faire pourvoir par la Municipalité, laquelle aura le droit de condamner le geôlier à l'amende, même de demander sa destitution au Directoire de Département, sans préjudice de la poursuite criminelle contre lui, s'il y a lieu.

X.

La Police des maisons d'arrêt, de justice & de prison appartiendra à la Municipalité du lieu.

XI.

En conséquence, si quelque détenu usoit de menaces, injures ou violence, soit à l'égard du[p.55]gardien ou geôlier, soit à l'égard des autres détenus, l'Officier Municipal pourra ordonner qu'il sera resserré plus étroitement ; renfermé seul, même mis aux fers en cas de fureur ou de violence grave, sans préjudice de la poursuite criminelle, s'il y a lieu.

XII.

Les maisons d'arrêt ou de justice seront entièrement distinctes des prisons qui pourront être établies pour peine, & jamais un homme condamné ne pourra être mis dans la maison d'arrêt ; ni un homme arrêté, même décrété, dans une prison.

 

Titre XIII. Des moyens d'assurer la liberté des citoyens contre les détentions illégales ou autres actes arbitraires.

 

Article premier.

Tout homme, quel que soit sa place ou son emploi, autres que ceux à qui la loi donne le droit d'arrestation, qui donnera, signera, exécutera l'ordre d'arrêter un citoyen, ou qui l'arrêtera effectivement, si ce n'est pour le remettre sur-le-champ à la Police, dans les cas déterminés par la présente loi, sera puni comme coupable du crime de détention arbitraire.[p.56]

II.

Nul homme, dans les cas où sa détention est autorisée par la loi, ne peut être conduit que dans les lieux légalement & publiquement désignés par l'administration du Département pour servir de maison d'arrêt, de maison de justice ou de prison, sous la même peine contre ceux qui le conduiraient, détiendroient ou prêteraient leur maison pour le détenir.

III.

Quiconque aura connoissance qu'un homme est détenu illégalement dans un lieu, est tenu d'en donner avis à un des Officiers municipaux, ou au Juge de Paix du Canton. Il pourra aussi en faire sa déclaration, signée de lui, au greffe de la Municipalité ou du Juge de Paix.

IV.

Ces officiers publics, d'après la connoissance qu'ils en auront, seront tenus de se transporter aussitôt et de faire remettre en liberté la personne détenue, à peine de répondre de leur négligence, et même d'être poursuivis comme coupables du crime de détention arbitraire, s'il est prouvé qu'ils avoient connoissance de la détention.

V.

Personne ne pourra refuser l'ouverture de sa maison pour cette recherche : en cas de résistance, l'Officier municipal, ou le Juge de paix, pourra se faire assister de la force nécessaire, et tous les citoyens seront tenus de prêter main-forte.

[p.57]

VI.

Dans le cas de détention légale, l'Officier municipal, lors de sa visite dans les maisons d'arrêt, de justice ou prisons, examinera ceux qui y sont détenus, et les causes de leur détention ; et tout gardien ou geôlier sera tenu, à sa réquisition, de lui représenter la personne de l'arrêté, sans qu'aucun ordre puisse l'en dispenser : et ce, sous peine d'être poursuivi comme coupable du crime de détention arbitraire.

VII.

Si l'Officier municipal, lors de sa visite, découvrait qu'un homme est détenu sans que sa détention soit justifiée par aucun des actes mentionnés dans les articles V et VI du titre XII, il en dressera sur-le-champ procès-verbal, fera conduire le détenu à la Municipalité, laquelle, après avoir de nouveau constaté le fait, le mettra définitivement en liberté, et dans ce cas poursuivra la punition du gardien ou geôlier.

VIII.

Les parens, voisins ou amis de l'arrêté, porteurs de l'ordre de l'Officier municipal, lequel ne pourra le refuser, auront aussi le droit de se faire représenter la personne du détenu, et le gardien ne pourra s'en dispenser qu'en justifiant de l'ordre exprès du Juge inscrit, sur son registre, de le tenir au secret.

IX.

Tout gardien qui refuserait de montrer au porteur de l'ordre de l'Officier municipal la personne de[p.58]l'arrêté sur la réquisition qui lui en seroit faite, ou de montrer l'ordre du Juge qui le lui défend, sera poursuivi, ainsi qu'il est dit, article VI et autres.

X.

Pour mettre les Officiers publics ci-dessus désignés à portée de prendre les soins qui viennent d'être recommandés à leur vigilance et à leur humanité, lorsque l'inculpé sera mené devant les Officiers municipaux, ainsi qu'il est dit, art. VI du titre II, ceux-ci après avoir pris note du mandat d'amener, entendront l'inculpé, et les plaintes qu'il pourroit faire des violences ou injures exercées contre lui en l'arrêtant : ils en dresseront procès-verbal, et l'enverront au Juge de paix.

XI.

Lorsque le prévenu aura été envoyé à la maison d'arrêt du District, copie du mandat sera remise à la Municipalité du lieu, et envoyée à celle du domicile du prévenu, s'il est connu ; celle-ci en donnera avis aux parens, voisins ou amis du prévenu.

XII.

Le directeur du Juré donnera également avis auxdites Municipalités de l'ordonnance de prise-de-corps rendue contre le prévenu, sous peine d'être suspendu de ses fonctions.

XIII.

Le Président du Tribunal criminel sera tenu, cous la même peine, d'envoyer auxdites Municipalités copie du jugement d'absolution ou de condamnation du prévenu.