4 janvier 1839 - Chambre des députés - Archives parlementaires, t. CXXIII.


Mavida M.J., Laurent M.L. (fond.), Barbier G., Claveau L., Lataste L., Pionnier C. (dir.), Archives parlementaires de 1787 à 1860, Recueil complet des débats législatifs et politiques des Chambres françaises, Deuxième série (1800 à 1860), t. CXXIII, 1911.

Numérisation et relecture des OCR réalisées par la Bibliothèque Cujas

[p.52]

Lecture du projet d'adresse au roi[1].

L'ordre du jour appelle la lecture du projet d'adresse en réponse au discours de la Couronne.

M. le Président. Je vais donner lecture à la Chambre du projet[2] présenté par la commission[3].

« Sire, la Chambre des députés se félicite, avec vous, de la prospérité du pays. Cette prospérité se développera de plus en plus au sein de la paix que nous avons maintenue, et dont une politique prudente et ferme peut seule nous garantir la durée.

Sous un Gouvernement jaloux de notre dignité, gardien fidèle de nos alliances, la France tiendra toujours dans le monde et dans l'estime des peuples, le rang qui lui appartient et dont elle ne veut pas déchoir.

Votre Majesté espère que les conférences reprises à Londres donneront de nouveaux gages au repos de l'Europe et à l'indépendance de la Belgique. Nous faisons des vœux sincères pour un peuple auquel nous lie étroitement la conformité des principes et des intérêts. La Chambre attend l'issue des négociations.

Vous nous annoncez, sire, qu'en vertu d'engagements pris avec le Saint-Siège, nos troupes sont sorties d'Ancône. Nous avons donné d'éclatants témoignages de notre respect pour les traités, mais nous regrettons que cette évacuation ne se soit pas effectuée en des circonstances plus opportunes et avec les garanties que devait stipuler une politique sage et prévoyante.

Un dissentiment a éclaté entre votre Gouvernement et la Suisse. Nous désirons qu'il n'ait point altéré les rapports de vieille amitié qui unissaient les deux pays, et qu'avaient encore resserrés les événements politiques de 1830.

C'est avec une profonde douleur que nous voyons l'Espagne se consumer dans les horreurs de la guerre civile. Nous souhaitons ardemment que le Gouvernement de Votre Majesté, en continuant de prêter à la cause de la reine Isabelle II l'appui que comportent les intérêts de la France, emploie, de concert avec ses alliés, toute son influence pour mettre un terme à de si déplorables excès.

La Chambre, vivement émue des malheurs de la Pologne, renouvelle ses vœux constants pour un peuple dont l'antique nationalité est placée sous la protection des traités.

Les outrages et les spoliations que nos nationaux ont subis au Mexique réclamaient une satisfaction éclatante. Votre Gouvernement a dû l'exiger. La Chambre espère qu'il aura pris, pour l'obtenir, des mesures promptes et décisives.

Nous nous applaudissons avec Votre Majesté de l'état satisfaisant de nos possessions d'Afrique. Nous avons la ferme confiance que cette situation s'améliorera de jour en jour, grâce à la discipline de l'armée, à la régularité de l'Administration et à l'action bienfaisante d'une religion éclairée. (Mouvement.)

Votre Majesté nous avait annoncé, dans une des précédentes sessions, que des propositions, relatives au remboursement de la dette publique, nous seraient présentées dès que l'état des finances le permettrait. La situation de plus en plus favorable du revenu public, nous donne le droit d'espérer que le concours de votre gouvernement ne manquera pas longtemps à cette importante mesure.

Les besoins de nos colonies et de notre navigation seront l'objet de toute notre sollicitude. Nous nous appliquerons à les concilier avec les intérêts de notre agriculture, dont le développement est d'une haute importance pour la prospérité du pays.

La Chambre examinera avec le même soin [p.53] les projets de loi destinés à réaliser les promesses de la Charte et à introduire de nouveaux perfectionnements dans la législation générale, ainsi que dans les diverses branches de l'Administration publique. Nos vœux appellent aussi le projet de loi relatif à l'organisation de l'état-major général de l'armée. (Sensation.)

Nous ressentons profondément, sire, vos espérances et vos craintes, vos joies et vos douleurs ; la France entière a salué de ses acclamations la naissance du Comte de Paris; fasse le ciel que rien ne trouble de si douces émotions ! Nous entourons de nos hommages le berceau de ce jeune prince accordé à votre amour et aux vœux les plus chers de la patrie. Élevé, comme son père, dans le respect de nos institutions, il saura l'origine glorieuse de la dynastie dont vous êtes le chef, et n'oubliera jamais que le trône où il doit s'asseoir un jour est fondé sur la toute-puissance du vœu national. (Mouvement général d'assentiment.)

Nous nous associerons, sire, ainsi que tous les Français, aux sentiments de famille et de piété que cet heureux événement vous inspire comme père et comme roi.

Nous en sommes convaincus, sire, l'intime union des pouvoirs contenus dans leurs limites constitutionnelles, peut seule fonder la sécurité du pays et la force de votre Gouvernement. Une Administration ferme, habile, s'appuyant sur les sentiments généreux, faisant respecter au dehors la dignité de votre trône et le couvrant au dedans de sa responsabilité, est le gage le plus sûr de ce concours que nous avons tant à cœur de vous prêter.

Confions-nous, sire, dans la vertu de nos institutions; elles assureront, n'en doutez pas, vos droits et les nôtres ; car nous tenons pour certain que la monarchie constitutionnelle garantit à la fois la liberté des peuples et cette stabilité qui fait la grandeur des États. »

(La lecture de ce projet d'adresse est suivie d'une vive et longue agitation.)

M. le Président. A quel jour la Chambre veut-elle fixer la discussion !

De toutes parts : A lundi ! À lundi !

M. le Président. Alors la discussion s'ouvrira lundi en séance publique. Demain, à neuf heures du matin, les membres qui voudront parler pour ou contre le projet d'adresse, pourront faire inscrire leurs noms au bureau de la Chambre.

(Le projet sera imprimé et distribué à domicile.)

(La séance est levée à 2 h. 1/2.)

Ordre du jour du lundi 7 janvier 1839.

A 1 heure, séance publique.

Discussion du projet d'adresse.

ANNEXES

à la séance de la Chambre des députés du vendredi 4 janvier 1839.

2e PROJET

d'adresse au roi[4] présenté par la commission[3].

« Sire, la Chambre des députés se félicite, avec vous, de la prospérité du pays. Cette prospérité se développera de plus en plus au sein de la paix que nous avons maintenue, et dont une politique prudente et ferme peut seule nous garantir la durée.

Sous un Gouvernement jaloux de notre dignité, gardien fidèle de nos alliances, la France tiendra toujours dans le monde et dans l'estime des peuples, le rang qui lui appartient et dont elle ne veut pas déchoir.

Votre Majesté espère que les conférences reprises à Londres donneront de nouveaux gages au repos de l'Europe et à l'indépendance de la Belgique. Nous faisons des vœux sincères pour un peuple auquel nous lie étroitement la conformité des principes et des intérêts. La Chambre attend l'issue des négociations.

Vous nous annoncez, sire, qu'en vertu d'engagements pris avec le Saint-Siège, nos troupes sont sorties d'Ancône. Nous avons donné d'éclatants témoignages de notre respect pour les traités, mais nous regrettons que cette évacuation ne se soit pas effectuée en des circonstances plus opportunes et avec les garanties que devait stipuler une politique sage et prévoyante.

Un dissentiment a éclaté entre votre Gouvernement et la Suisse. Nous désirons qu'il n'ait point altéré les rapports de vieille amitié qui unissaient les deux pays, et qu'avaient encore resserrés les événements politiques de 1830.

C'est avec une profonde douleur que nous voyons l'Espagne se consumer dans les horreurs de la guerre civile. Nous souhaitons ardemment que le Gouvernement de Votre Majesté, en continuant de prêter à la cause de la reine Isabelle II l'appui que comportent les intérêts de la France, emploie, de concert avec ses alliés, toute son influence pour mettre un terme à de si déplorables excès.

La Chambre, vivement émue des malheurs de la Pologne, renouvelle ses vœux constants pour un peuple dont l'antique nationalité est placée sous la protection des traités.

Les outrages et les spoliations que nos nationaux ont subis au Mexique réclamaient une satisfaction éclatante. Votre Gouvernement a dû l'exiger, et le brillant fait d'armes de Saint-Jean-d'Ulloa, en couvrant notre armée d'une nouvelle gloire, est un juste sujet d'orgueil pour la France. Elle a vu avec bonheur, sire, un de vos fils partager les dangers et les succès de nos intrépides marins.

Nous nous applaudissons avec Votre Majesté [p.54] de l'état satisfaisant de nos possessions d'Afrique. Nous avons la ferme confiance que cette situation s'améliorera de jour en jour, grâce à la discipline de l'armée, à la régularité de l'Administration et à l'action bienfaisante d'une religion éclairée.

Votre Majesté nous avait annoncé, dans une des précédentes sessions, que des propositions, relatives au remboursement de la dette publique, nous seraient présentées dès que l'état des finances le permettrait. La situation de plus en plus favorable du revenu public nous donne le droit d'espérer que le concours de votre Gouvernement ne manquera pas longtemps à cette importante mesure.

Les besoins de nos colonies et de notre navigation seront l'objet de toute notre sollicitude. Nous nous appliquerons à les concilier avec les intérêts de notre agriculture, dont le développement est d'une haute importance pour la prospérité du pays.

La Chambre examinera avec le même soin les projets de loi destinés à réaliser les promesses de la Charte et à introduire de nouveaux perfectionnements dans la législation générale, ainsi que dans les diverses branches de l'Administration publique. Nos vœux appellent aussi le projet de loi relatif à l'organisation de l'état-major général de l'armée.

Nous ressentons profondément, sire, vos espérances et vos craintes, vos joies et vos douleurs ; la France entière a salué de ses acclamations la naissance du Comte de Paris; fasse le ciel que rien ne trouble de si douces émotions ! Nous entourons de nos hommages le berceau de ce jeune prince accordé à votre amour et aux vœux les plus chers de la patrie. Élevé, comme son père, dans le respect de nos institutions, il saura l'origine glorieuse de la dynastie dont vous êtes le chef, et n'oubliera jamais que le trône où il doit s'asseoir un jour est fondé sur la toute-puissance du vœu national. Nous nous associerons, sire, ainsi que tous les Français, aux sentiments de famille et de piété que cet heureux événement vous inspire comme père et comme roi.

Nous en sommes convaincus, sire, l'intime union des pouvoirs contenus dans leurs limites constitutionnelles peut seule fonder la sécurité du pays et la force de votre Gouvernement. Une Administration ferme, habile, s'appuyant sur les sentiments généreux, faisant respecter au dehors la dignité de votre trône et le couvrant au dedans de sa responsabilité, est le gage le plus sûr de ce concours que nous avons tant à cœur de vous prêter. Confions-nous, sire, dans la vertu de nos institutions ; elles assureront, n'en doutez pas, vos droits et les nôtres ; car nous tenons pour certain que la monarchie constitutionnelle garantit à la fois la liberté des peuples et cette stabilité qui fait la grandeur des États. »

3e PROJET

d'adresse au roi[6] présenté par la commission[3].

« Sire, la Chambre des députés se félicite, avec vous, de la prospérité du pays. Cette prospérité se développera de plus en plus au sein de la paix que nous avons maintenue, et dont une politique prudente et ferme peut seule nous garantir la durée.

Sous un Gouvernement jaloux de notre dignité, gardien fidèle de nos alliances, la France tiendra toujours dans le monde et dans l'estime des peuples, le rang qui lui appartient et dont elle ne veut pas déchoir.

Votre Majesté espère que les conférences reprises à Londres donneront de nouveaux gages au repos de l'Europe et à l'indépendance de la Belgique. Nous faisons des vœux sincères pour un peuple auquel nous lie étroitement la conformité des principes et des intérêts. La Chambre attend l'issue des négociations.

Vous nous annoncez, sire, qu'en vertu d'engagements pris avec le Saint-Siège, nos troupes sont sorties d'Ancône. Nous avons donné d'éclatants témoignages de notre respect pour les traités, mais nous regrettons que cette évacuation ne se soit pas effectuée en des circonstances plus opportunes et avec les garanties que devait stipuler une politique sage et prévoyante.

Un dissentiment a éclaté entre votre Gouvernement et la Suisse. Nous désirons qu'il n'ait point altéré les rapports de vieille amitié qui unissaient les deux pays, et qu'avaient encore resserrés les événements politiques de 1830.

C'est avec une profonde douleur que nous voyons l'Espagne se consumer dans les horreurs de la guerre civile. Nous souhaitons ardemment que le Gouvernement de Votre Majesté, en continuant de prêter à la cause de la reine Isabelle II l'appui que comportent les intérêts de la France, emploie, de concert avec ses alliés, toute son influence pour mettre un terme à de si déplorables excès.

La Chambre, vivement émue des malheurs de la Pologne, renouvelle ses vœux constants pour un peuple dont l'antique nationalité est placée sous la protection des traités.

Les outrages et les spoliations que nos nationaux ont subis au Mexique réclamaient une satisfaction éclatante. Votre Gouvernement a dû l'exiger, et le brillant fait d'armes de Saint-Jean-d'Ulloa, en couvrant notre armée d'une nouvelle gloire, est un juste sujet d'orgueil pour la France. Elle a vu avec bonheur, sire, un de vos fils partager les dangers et les succès de nos intrépides marins.

Nous nous applaudissons avec Votre Majesté de l'état satisfaisant de nos possessions d'Afrique. Nous avons la ferme confiance que cette situation s'améliorera de jour en jour, grâce à la discipline de l'armée, à la régularité de l'Administration et à l'action bienfaisante d'une religion éclairée.

Votre Majesté nous avait annoncé, dans une des précédentes sessions, que des propositions, relatives au remboursement de la dette publique, nous seraient présentées dès que l'état des finances le permettrait. La situation de plus en plus favorable du revenu public, nous donne le droit d'espérer que le concours [p.55] de votre Gouvernement ne manquera pas longtemps à cette importante mesure.

Les besoins de nos colonies et de notre navigation seront l'objet de toute notre sollicitude. Nous nous appliquerons à les concilier avec les intérêts de notre agriculture, dont le développement est d'une haute importance pour la prospérité du pays.

La Chambre examinera avec le même soin les projets de loi destinés à réaliser les promesses de la Charte et à introduire de nouveaux perfectionnements dans la législation générale, ainsi que dans les diverses branches de l'Administration publique. Nos vœux appellent aussi le projet de loi relatif à l'organisation de l'état-major général de l'armée.

Sire, la France entière a salué de ses acclamations la naissance du Comte de Paris. Nous entourons de nos hommages le berceau de ce jeune prince accordé à votre amour et aux vœux les plus chers de la patrie. Élevé, comme son père, dans le respect de nos institutions, il saura l'origine glorieuse de la dynastie dont vous êtes le chef, et n'oubliera jamais que le trône où il doit s'asseoir un jour est fondé sur la toute-puissance du vœu national. Nous nous associerons, sire, ainsi que tous les Français, aux sentiments de famille et de piété que cet heureux événement vous inspire comme père et comme roi.

Pourquoi, sire, au moment où s'élèvent nos actions de grâce, sommes-nous appelés à déplorer avec vous la perte d'une fille chérie, modèle de toutes les vertus ! Puisse l'expression des sentiments de la Chambre entière apporter quelque soulagement aux douleurs de votre auguste famille !

Nous en sommes convaincus, sire, l'intime union des pouvoirs contenus dans leurs limites constitutionnelles peut seule fonder la sécurité du pays et la force de votre Gouvernement. Une Administration ferme, habile, s'appuyant sur les sentiments généreux, faisant respecter au dehors la dignité de votre trône, et le couvrant au dedans de sa responsabilité, est le gage le plus sûr de ce concours que nous avons tant à cœur de vous prêter. Confions-nous, sire, dans la vertu de nos institutions ; elles assureront, n'en doutez pas, vos droits et les nôtres ; car nous tenons pour certain que la monarchie constitutionnelle garantit à la fois la liberté des peuples et cette stabilité qui fait la grandeur des États. »